Un commerce souterrain inquiétant prend racine en Côte d’Ivoire. Des parties de corps de femmes excisées, notamment les clitoris, sont transformées en poudre et vendues à des prix exorbitants. Selon une enquête menée par l’Agence France-Presse (AFP), cette poudre peut se vendre jusqu’à 75 000 francs CFA, et le trafic, bien que clandestin, perdure malgré les efforts pour l’éradiquer. Le commerce implique des féticheurs et des exciseuses, perpétuant une pratique interdite, mais encore présente dans certaines régions du pays.
Une chaîne macabre d’approvisionnement de clitoris en poudre
Les exciseuses, souvent issues de traditions anciennes, prélèvent le clitoris des femmes lors de rituels d’excision, une mutilation génitale qui, bien qu’elle soit interdite par la loi ivoirienne depuis 1998, reste pratiquée dans certaines communautés. Les clitoris ainsi récoltés sont ensuite revendus aux féticheurs. Ces derniers, figures mystiques et spirituelles dans certaines cultures locales, transforment le tissu prélevé en poudre. Le prix de cette poudre macabre varie en fonction du statut de la femme. Une jeune fille vierge se verra arracher cette partie de son corps pour un prix atteignant 100 000 francs CFA, tandis que le clitoris d’une femme ayant déjà eu des enfants peut être vendu à environ 65 000 francs CFA.
Le processus de transformation est aussi sinistre que la récolte elle-même. Le clitoris est d’abord séché pendant trois jours, avant d’être broyé en poudre à l’aide d’une pierre. Cette poudre, qui devient ensuite un objet de convoitise, est vendue à des clients variés, des hommes politiques aux citoyens ordinaires. Selon les dires des féticheurs, elle est censée offrir des avantages occultes et sociaux.
Des croyances mystiques qui perdurent
Dans certaines régions de la Côte d’Ivoire, la poudre de clitoris est perçue comme un produit capable de conférer des pouvoirs particuliers. Appliquée sur le visage, elle est supposée garantir succès et prospérité à celui ou celle qui l’utilise. Certains y voient un moyen de maintenir un poste prestigieux, d’autres espèrent remporter des élections ou même protéger leurs relations amoureuses. Le directeur de l’Organisation nationale pour l’enfant, la femme et la famille a souligné que cette croyance en des pouvoirs magiques est profondément enracinée dans certaines traditions ivoiriennes. Dans certaines localités, la poudre est même utilisée pour attirer richesse et succès dans les affaires.
Une loi bafouée et un combat qui continue
Bien que la pratique de l’excision soit officiellement interdite en Côte d’Ivoire depuis plus de deux décennies, le commerce illicite et les mutilations génitales féminines continuent d’être un fléau dans certaines communautés. L’excision demeure une menace, non seulement pour les droits des femmes, mais également pour leur intégrité physique et mentale. Malgré les interdictions, des milliers de jeunes filles continuent d’être victimes de cette pratique, perpétuant ainsi une tradition violente et archaïque.
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La lutte contre ce commerce est essentielle pour protéger les femmes et les jeunes filles ivoiriennes. Il est impératif que les autorités, les organisations locales et internationales ainsi que les communautés elles-mêmes redoublent d’efforts pour sensibiliser et éradiquer cette pratique. L’enjeu dépasse la seule question des mutilations ; il s’agit également de garantir un avenir plus juste et équitable pour toutes les femmes et filles du pays.